Une approche des mathématiques qui dérange


Élisabeth Busser

La théorie des ensembles, iconoclaste à ses débuts avec Cantor, est devenue universelle. Du jamais vu depuis Euclide : elle fournit une base aux mathématiques ! Cette base semble solide, jusqu'à l'apparition de paradoxes. Quelle est donc cette construction mathématique si controversée ?

La notion d'ensemble, qui nous est si familière, n'a jamais fait surface en mathématiques avant les travaux du mathématicien allemand Georg Cantor. On parlait alors de « variété », de « totalité », de « classe » et Cantor a inventé non seulement un tout autre langage, mais l'axiomatique qui va avec, ouvrant la boîte de Pandore d'une théorie alors incongrue, dont il n'avait sans doute pas prévu tous les développements ni tous les excès.

 

Cantor : nommer les concepts

Avant le milieu du XIXe siècle, en mathématiques, les concepts primaient sur la rigueur des énoncés. On avait bien rencontré chez Augustin Cauchy (1789–1857) et chez Bernard Bolzano (1781–1848) des esquisses de clarification de notions comme la continuité, la limite, la convergence en analyse, mais c'est avec les Allemands Georg Cantor et Richard Dedekind (1831–1916) que les objets mathématiques prennent réellement un nom. En 1883 paraît dans les Acta Mathematica une version française des mémoires publiés par Cantor depuis 1870, première ébauche de sa Mengenlehre, devenue notre « théorie des ensembles ». Très préoccupé par les problèmes de dénombrement, plus particulièrement celui de « compter » l'infini, Cantor se pose en ces termes le problème de l'identification de deux fonctions f et g représentées toutes deux par des séries trigonométriques, mises au ... Lire la suite