Quand la théorie des jeux entre en scène


Léo Gerville Réache

Vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, le célèbre mathématicien John von Neumann et l'économiste Oskar Morgenstern investissent un champ nouveau en donnant des bases mathématiques aux comportements stratégiques de joueurs ou d'acteurs économiques.

Nous sommes en 1944 lorsque sort la première édition du livre Theory of Games and Economic Behavior écrit par le mathématicien John Von Neumann et l’économiste Oskar Morgenstern. C’est une petite révolution !

 

John von Neumann (1903−1957).

 

Toute théorie mathématique se fonde sur une axiomatique. Il s’agit de ses fondations, et c’est à partir d’elles que tout commence. Lorsqu’on les regarde, elles semblent relativement élémentaires. On peut même les trouver naïves. Elles sont en réalité subtiles et redoutables. C’est leur généralité (embrassant l’essentiel du thème qu’elles sont censées couvrir) et leur cohérence jusqu’au-boutiste qui les feront passer (ou non) à la postérité.

 

 

Remontons le temps…

En 1738, Daniel Bernoulli propose de raisonner en termes d’« espérance morale » pour résoudre le paradoxe de Saint-Pétersbourg. Plus largement, il traite de la question des préférences entre « loteries ». Sa thèse est que nos préférences doivent se fonder sur l’espérance morale.

Mais Jean le Rond d’Alembert (son contemporain), connu pour ses doutes sur le calcul des probabilités (voir Tangente 175, 2017), remettait déjà en cause le bien-fondé de cette espérance. Il écrivait :

« Je voyais bien que l’espérance était d’autant plus grande :

- que la somme espérée était plus ... Lire la suite


références

 Non-cooperative games. John Nash, 1950.
 Theory of Games and Economic Behavior. John von Neumann et Oskar Morgenstern, Princeton University Press, 1953 (cinquième édition).
 Comment se comporter rationnellement face au risque ? Léo Gerville-Réache, Tangente 180, 2018.
 D'Alembert et « pile ou face » : une querelle historique. Léo Gerville-Réache, Tangente 175, 2017.