L'approche qualitative : un détour fécond


Jean Aymès

Tout lycéen apprend à exprimer explicitement les racines réelles d'une équation polynomiale du second degré à partir de racines carrées. Cela devient beaucoup plus difficile pour des équations de degré plus élevé et impossible à partir du cinquième degré.

Les mathématiciens sont néanmoins parvenus à bâtir une autre approche : Jacques Charles François Sturm (1803-1855) a proposé, à l’âge de 26 ans, une méthode permettant de déterminer le nombre de racines réelles entre deux bornes.

Face à une équation polynomiale, une fois appliquée la méthode de Sturm, il devient ensuite possible d’approcher chacune des racines, par exemple par des procédés algorithmiques. La première phase de cette étude est dite qualitative, la seconde, quantitative.

Lorsque, dans ses premiers travaux sur les équations différentielles, Henri Poincaré adopte son « but nouveau de géométrie qualitative », c’est à cela qu’il se réfère et qu’il transpose. L’impossibilité de détermination des solutions de ces équations ne ferme pas l’horizon, il ouvre une autre approche. Celle où rechercher « quelles sont les propriétés des équations différentielles est du plus haut intérêt ».

Qu’il se pose des questions sur la position relative des astres (stabilité, éloignement ou rapprochement), l’étude qualitative des équations différentielles qui modélisent le mouvement des astres est bien à propos.

L’étude des relations qui subsistent dans une figure lorsqu’on la déforme d’une manière quelconque sans lui imposer ni déchirure, ni duplicature, qui conduira à la topologie algébrique, est un autre exemple de son approche qualitative des problèmes.