On entend et on lit souvent le jugement péremptoire selon lequel les mathématiques chinoises anciennes seraient dépourvues de démonstration : on n’y trouverait que des procédures algorithmiques. Une telle affirmation est nuancée par les travaux de l’historien Jean-Claude Martzloff. Selon lui, l’absence de traces explicites de démonstration dans les textes anciens ne signifie pas nécessairement son inexistence ; elle pourrait résulter d’une transmission fragmentaire ou de conventions d’écriture qui ont évolué dans le temps. Les textes mathématiques anciens que nous lisons en langue chinoise ne sont pas forcément tout à fait conformes à la manière dont ils ont été initialement rédigés (voir l'article « Sources et variété des mathématiques dites chinoises »). Concernant le point spécifique de la démonstration au sens où nous l’entendons en Occident, il s’agit d’une notion importée par les jésuites au XVIe siècle, et qui était déjà familière des Grecs. Dans le Ménon, Socrate utilise le verbe δείκνυμι (deiknumi, « montrer »), qui chez Euclide prendra le sens de démontrer.
Il faut donc se livrer à un travail d’archéologie textuelle sur les sources antérieures à l’arrivée des jésuites, comme le fit Paul Pelliot (1878-1945) qui exhuma des grottes de Dunhuang (au nord-ouest de la Chine actuelle) des textes ... Lire la suite
