En souvenir de Michèle Audin


Élisabeth Busser et Roger Mansuy

La mathématicienne Michèle Audin, spécialiste de géométrie symplectique (à la croisée de la géométrie différentielle et des systèmes dynamiques) à l’université de Strasbourg est décédée le 14 novembre 2025.

Très impliquée dans la diffusion de la culture mathématique et dans la littérature avec plusieurs romans à son actif, elle était également membre de l’Ouvroir de littérature potentielle (Oulipo). Très engagée sur la place des femmes dans le monde mathématique, elle a été présidente de l’association Femmes et mathématiques de 1990 à 1991. Se passionnant pour l’histoire, en particulier la Commune de Paris (1871), elle a publié de nombreux ouvrages sur le sujet. Son dernier ouvrage, La maison hantée, a pour cadre la Seconde Guerre mondiale. Elle a consacré un livre, Une vie brève, à son père, Maurice Audin, mathématicien lui aussi, enlevé et assassiné par l’armée française en Algérie en 1957 et en mémoire de qui elle a refusé la Légion d’honneur qu’on lui proposait en 2009. 

 

 

Découvrir l’œuvre de Michèle Audin

Voici quelques excellentes recommandations (présentées par ordre croissant de contenu mathématique) pour découvrir l’œuvre littéraire de Michèle Audin et y retrouver sa sensibilité, ses souvenirs, ses combats et ses colères…

* La maison hantée, Les Éditions de Minuit, 2025. La narratrice, une bibliothécaire qui est le double de fiction de l’autrice découvre l’histoire de son appartement, de la rue Dunat-Diehr. On y suit les Strasbourgeois expulsés de la ville au début de la guerre, ceux autorisés à y revenir sous l’occupation, ceux qui se retrouvent ballotés dans la guerre. Ce roman fait découvrir une facette mal connue de l'histoire alsacienne. 

* Une vie brève, Gallimard, 2013. Récit très émouvant de ce que devaient être les vingt-cinq années de la vie de son père, Maurice Audin (1932-1957), brutalement et injustement interrompue.

* Oublier Clémence, Gallimard, 2018. Un court texte pour rendre hommage à une ouvrière anonyme et à tous les anonymes oubliés de l’histoire.

* Souvenirs sur Sofia Kovalevskaïa, Calvage et Mounet, 2008. Michèle Audin choisit de présenter la mathématicienne Sofia Kovalevskaïa (1850-1891) en mêlant les aspects biographiques, les éléments de ses mathématiques (les travaux sur les EDP qu’elle détaille sans concession) et les convictions progressistes de cette révoltée. 

* La formule de Stokes, Cassini, 2016. Le premier roman dont le héros est une formule. On parcourt le calendrier et jour après jour mais en naviguant à travers les siècles, on rencontre des histoires de la formule de Stokes : la découverte historique, les applications ou même, avec une jolie mise en abyme, l’écriture de ce livre. Un roman oulipien et mathématicien !

* Fatou, Julia, Montel, Springer, 2009. Michèle Audin examine les biographies de Gaston Julia, Paul Montel et du moins connu Pierre Fatou, leurs contributions dans l’étude de l’itération des fractions rationnelles, leurs conflits... et les reconnaissances qui ont découlé de ces travaux. Une belle porte d’entrée dans les mathématiques de la première moitié du XXe siècle.

-->