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Pierre de Fermat, un célèbre contemporain


Marc Thierry

Qui est Pierre de Fermat ? Pascal le considère comme le plus grand mathématicien de son temps. C’est un homme fort modeste, probablement conscient de ses incroyables capacités en mathématiques, qui n’hésite pas à dévoiler ses idées souvent originales. On sait qu’il fut un homme de grande culture, capable de traduire des ouvrages du latin et du grec, de rédiger des poèmes raffinés, y compris… en espagnol.

 

Fermat a eu une existence paisible, très occupé par ses activités professionnelles (il fut conseiller, à partir de 1637, au Parlement de Toulouse), réservant ses quelques moments de détente à la recherche en mathématiques. Fermat, en 1654, est reconnu comme un immense mathématicien, bien que n’ayant jamais publié de mémoire ou de traité. Il a anticipé la géométrie analytique de Descartes ainsi que le calcul différentiel de Leibniz et Newton, ce dernier ayant explicitement reconnu avoir été inspiré par le Toulousain. Il a donné un nouveau souffle à la théorie des nombres et il est, avec Pascal, l’inventeur du calcul des probabilités.

 

 

Une correspondance unique et inestimable

 

La correspondance entre Blaise Pascal et Pierre de Fermat se résume à quelques lettres échangées essentiellement pendant l’été 1654 ; elle est de plus incomplète car certaines lettres sont perdues. Certaines de ces pages vont bouleverser la pensée humaine : nous assistons à la création de la géométrie du hasard, c’est-à-dire la naissance du calcul des probabilités. Les deux génies correspondent avec élégance, dévoilant les secrets de leurs inventions, en toute confiance, ce qui est assez rare dans une correspondance entre mathématiciens à cette époque. Les deux savants se respectent, et probablement Pascal reconnaît-il la supériorité de Fermat. Celui-ci ne développe pas ses raisonnements, se contentant de les esquisser, il est donc difficile à suivre (ce que la postérité lui a parfois sévèrement reproché). On devine, toutefois, que Pascal a compris les intuitions géniales de son interlocuteur ; il lui déclare en effet, le 29 juillet 1654 : « Je voudrais désormais vous ouvrir mon cœur, s’il se pouvait, tant j’ai de joie de voir notre rencontre. Je vois bien que la vérité est la même à Toulouse et à Paris. »

 

 

La descente infinie de Fermat

 

Fermat a inventé une méthode de démonstration appelée, selon la tradition, descente infinie. L’idée est la suivante : on veut prouver qu’une propriété P (n) dépendant de l’entier n n’est jamais vérifiée. Entamant un raisonnement par l’absurde, Fermat suppose qu’il existe un entier n tel que P (n) est vraie ; il montre alors qu’il existerait un entier m < n tel que P (m) est encore vraie. Ce faisant, le raisonnement s’applique désormais à l’entier m. Mais comme la « descente infinie » est impossible dans les entiers (qui sont minorés par 0), il conclut que l’entier n ne peut exister, et donc que P (n) est toujours fausse.

Le Toulousain semble avoir explicité sa méthode de démonstration au Clermontois, afin de prouver qu’aucun triangle pythagoricien (triangle rectangle tel que la mesure de chacun des côtés est un entier) n’a une aire qui est le carré d’un entier. En fait, le raisonnement par récurrence et le raisonnement par descente infinie sont équivalents.