Interview du biostatisticien Bruno Falissard


Julien Dupin

Bruno Falissard est psychiatre, professeur de biostatistiques à l’université Paris-Sud et directeur du centre de recherche en épidémiologie et santé des populations. Il nous explique quel rôle les statistiques peuvent jouer dans l’évaluation des nouvelles thérapies.

Tangente : L’émergence de thérapies dites personnalisées est une chance pour les patients mais présente un véritable défi pour évaluer l’efficacité de ces médicaments. En quoi les statistiques peuvent être utiles pour relever le défi de la médecine personnalisée ?

Bruno Falissard : Ce qui se passe depuis cinq ou dix ans, c’est que les thérapeutiques sont davantage ciblées, et donc les populations auxquelles on est susceptible de donner le nouveau médicament deviennent de plus en plus petites. Ça, pour les statisticiens, c’est un problème quasiment insoluble : les solutions qui existent sont l’exception. Il y a possibilité de contourner la difficulté ; par exemple, dans une pathologie assez rare, on va tester le nouveau médicament sur un grand nombre de patients disponibles, et il n’y en aura pas beaucoup, puis on va comparer l’effet du médicament à ce qui a été observé dans cet échantillon par rapport à ce qui se passait avant et qui a pu être récolté dans des bases de données, des registres. On appelle cela des contrôles historiques. Cela permet d’augmenter la puissance statistique, et donc d’éviter d’inclure et de tirer au sort des centaines de sujets alors qu’il n’en existe que quelques dizaines. Cela se fait, mais l’inconvénient est que la ... Lire la suite